
Notre choix va vers l’esprit dit de viniyoga transmit par Krishnamacharya et son fils Deshikachar. La séance va s’articuler autour d’une posture-clé. Avec tout d’abord une préparation posturale préalable, dynamique et/ou statique (plus ou moins longue selon les difficultés éventuelles de la posture choisie), puis la posture, enfin un rééquilibrage éventuel et une ou plusieurs postures de complémentarité. Cela va nécessiter une analyse attentive de la spécificité de la posture, de ce qu’elle va solliciter en nous, et aussi une recherche sur quels en seront les rééquilibrages et complémentarités possibles.
Comme nous tenons à ce que la posture cœur de séance change très souvent, ainsi les pratiquants pourront expérimenter et approfondir une large palette posturale et goûter des séances au parfum différent tout au cours de la saison yoguique.
A présent nous allons nous proposer de construire une séance autour de la posture Satyeshikâsana, posture que nous avons analysée dans l’article ici : http://yoga.m.aflallo.free.fr/?p=182.
Tout d’abord nous pouvons commencer debout, car c’est notre spécificité humaine que d’être des redressés. Profitons-en pour prendre conscience de cette particularité, depuis les pieds jusqu’au sommet du crâne.
Installons un « état des lieux » de notre ambiance physique, de notre ambiance intérieure, de notre souffle. Sans aucun commentaire, en témoin.
Puis nous sensibiliserons tout particulièrement les points de contact des pieds dans le sol, et les éveillerons avec une stimulation dynamique faite de pressions rapides et alternatives des orteils, dans un sens, dans l’autre, puis de petites frappes des pieds sur le sol. Une série de rotations des chevilles, en appui sur le souffle, complètera cette dynamique d’éveil des racines.
On retrouve la conscience de la caresse du souffle dans les narines. En inspirant, on laisse s’ouvrir les bras latéralement jusqu’à la verticale, puis on les ramène, toujours latéralement, sur l’expire. Et ce sur quelques respirations. Ce mouvement nous permet d’allonger le souffle et de l’habiter sans effort. Il nous permet aussi d’occuper notre espace, largement, sans le limiter à la frontière des doigts (dessin 1).
Installons Samasthiti (dessin 2) et proposons-nous une série de Salutations au Soleil.
Après les Salutations, la posture de la Chaise (Pithâsana) (dessin 3), avec les mains aux coudes ou bien en salut dans le dos, va tonifier cuisses et jambes tout en commençant à nous rapprocher du sol.
Finissant la descente nous nous retrouvons en Fœtus accroupi (Garbhâsana) (dessin 4).
De là on laissera se déposer le dos sur le sol, consciemment, vertèbre après vertèbre, les mains derrière la tête afin de garder la nuque longue, le menton collé au sternum.
Nous installons alors Shavâsana (dessin 5) en développant la conscience des enracinements du corps dans le sol, dans l’espace, et en gardant toujours une attention fine sur le mouvement du souffle.
Tonifications en Shavâsana :
Sans bouger habitons le bras droit et, après avoir expiré, sur une longue inspiration fermons le poing et tonifions la main, l’avant-bras, le bras, l’épaule, l’omoplate et la poitrine à droite. On relâche en expirant et ainsi trois fois.
Observons la différence de perception entre ce bras et le reste du corps.
Procédons de même pour le pied et la jambe à gauche jusqu’à la hanche et la fesse.
Puis tonification de cette diagonale, bras droit jambe gauche.
Bien évidemment même expérience avec l’autre bras, l’autre jambe puis les deux.
Enfin, sans suspendre le souffle et sur plusieurs respirations tonifions la globalité du corps, sauf le visage qui reste détendu.
Puis un petit temps d’observation.
Toujours sur le sol on replie le genou droit, le pied par terre, et on laisse le genou s’ouvrir vers le sol à droite, la voûte plantaire du pied en contact avec la face interne de la cuisse gauche. Le bras droit va s’allonger à 45° vers l’arrière, sur le sol, main détendue et paume vers le haut. La main gauche se pose sur le ventre. Nous sommes dans la posture de l’Arbre Couché (Supta Vrikshâsana) (dessin 6).
Dans cet Arbre « en diagonale » on laisse couler le souffle et le mouvement du regard intérieur depuis la main droite vers le ventre sur l’inspiration et du ventre vers le pied gauche sur l’expiration. Remontée du pied vers le ventre sur l’inspire et du ventre vers la main droite sur l’expire. Et ce un certain nombre de fois.
Après avoir ramené et observé, on s’installe dans l’autre diagonale avec le même vécu.
Puis nous roulerons sur le côté gauche, le bras dans le prolongement du corps, la tête sur le bras, et les deux jambes l’une sur l’autre. Nous allons procéder à un balayage horizontal de la jambe du dessus, la droite.
En inspirant et sans plier le genou on amène la jambe vers l’arrière, au ras du sol le plus loin possible, et en expirant, toujours la jambe allongée, vers l’avant le plus près possible du buste. Sur trois respirations, pas trop rapides. Puis on reste avec la jambe vers l’arrière sur quelques respirations.
Même expérience de l’autre côté avec la jambe gauche.
A présent, sur le ventre, après avoir verrouillé le bassin et les lombes, on va installer une Demi-Barque en levant bras droit et jambe gauche Ardha Navâsana (dessin n°7). On reste attentif à lever le bras depuis l’épaule et à lever la jambe depuis la fesse et la hanche pour ne pas tétaniser les muscles qui ne sont pas nécessaires au maintien de la posture.
Dans la posture on peut installer une circulation de conscience le long de la diagonale main droite pied gauche, aller et retour, sur le souffle avant de rester dans un vécu global. Puis on alterne la diagonale.
En toute logique, après avoir au préalable étiré sur le sol bras et jambes, le bassin toujours verrouillé, on installera ensuite la posture de la Barque (Navâsana) (dessin n°8). La montée se faisant, là encore, depuis les épaules, le fessier et les hanches.
Passant d’abord par la posture du Fœtus (Garbhâsana) (dessin n°9) nous nous positionnerons ensuite à quatre pattes. Dans cette situation le bras droit s’allongera vers l’avant, tout en gardant le bout des doigts sur le sol, puis la jambe gauche vers l’arrière, en gardant les orteils en contact avec le sol. Sur une inspiration bras droit et jambe gauche se lèveront en même temps, toujours depuis l’épaule et depuis la fesse. C’est une variante simple du Chat Sauvage (Vyagrâsana) (dessin n°10). On pourra installer la même circulation de conscience que dans la demi-barque.
Après le retour à quatre pattes on montera l’autre diagonale.
Après un passage de nouveau par Garbhâsana, en restant assis sur les talons, on redresse le buste et on pose les mains sur le ventre. Tout en expirant on contracte les muscles du ventre et on termine avec un mûla bandha dans la zone racine. Et ce sur trois expirations.
Enfin on se met debout et on installe la posture Satyeshikâsana (dessin n°11) comme décrite dans l’article précédent.
Après cette posture, et toujours debout, on s’installera en Demi-Lune arrière (dessin n°12).
Puis l’Arbre (Vrikshâsana) dans sa variante en diagonale (dessin n°13), avec le mouvement du regard intérieur comme pour l’Arbre Couché. La main qui est dans le dos en Jñana mudrâ et celle qui est en haut, dans l’espace, tout d’abord en Prâna mudrâ puis en Jñana mudrâ quand on aura cessé la circulation de conscience.
Suivra peut-être le Palmier (Talâsana) (dessin n°14) redressé sur les orteils, les mains en Padma mudrâ.
Enfin, comme au tout début de la séance, prenons de nouveau conscience de notre verticalité et de notre spécificité d’homme debout.
Installons des enracinements. Dans le sol par les pieds et dans l’espace vertical par le sommet du crâne. Sensibilisons la face avant du corps et prolongeons loin, large, en expansion vers l’avant, de même avec la face arrière du corps, puis le côté droit, le côté gauche, enfin en expansion dans toutes les directions de l’espace. Nous sommes ainsi largement ouverts et déployés dans toutes les directions et dans toutes les dimensions. Nous nous trouvons à notre place.
Prenons alors une assise confortable (dessin n°15).
Dans l’assise nous retrouvons le souffle.
Commençons par une série de Kapâlabhâti, ce qui contribue à activer tout l’organisme et à libérer le souffle tout en installant une jolie sensation d’euphorie.
Continuons ensuite avec un Nâdî Shodhana tout simple. Tout d’abord avec l’aide des doigts, puis sans, en jouant simplement sur le passage du souffle alternatif dans les narines. Nâdî Shodhana va compléter dans le vécu subtil du Prânâyama celui « par moitié » qui était dominant au cours de la séance.
Ensuite, tout en gardant un souffle léger et équilibré, les mains vont se poser sur le ventre dans la mudrâ Agni. Observons les résonances en toute liberté.
Puis, tout simplement, on positionne les mains en Dhyâna mudrâ et on reste dans le silence.